Le 9 juin dernier, le Sénat a déposé et voté un amendement à la loi contre les violences conjugales, ajoutant dans le texte l’obligation pour les sites pornographiques de vérifier l’âge de leurs utilisateurs. Il est intéressant de constater qu’à cette occasion, le combat contre les méfaits de la pornographie vienne s’insérer dans une réflexion plus large, sur les violences conjugales. Il n’y a là point de hasard : l’augmentation dramatique des violences dans les couples se nourrit bien entendu de la vision dévoyée de la sexualité et des rapports entre l’homme et la femme véhiculée par les contenus pornographiques.
L’objectif de l’amendement est clair : empêcher les mineurs d’accéder aux sites pornographiques. Il reprécise et renforce une disposition déjà contenue dans la proposition de loi votée en première lecture à l’Assemblée en janvier. Soutenue par le gouvernement, cette proposition faisait suite aux annonces d’Emmanuel Macron il y a six mois, manifestant sa volonté de lutter plus efficacement contre le fléau de la pornographie et ses dégâts sur les plus fragiles d’entre tous, les enfants.
Les pouvoirs publics ont donc enfin choisi de se saisir du dossier : voilà des années que nous attendions cette prise en main du problème de la pornographie, et que nous œuvrons dans ce sens. Depuis 2018, nous menons un intense travail de lobbying qui porte aujourd’hui ses fruits, et nous nous en réjouissons : conférences, diffusion massive de notre documentaire auprès de la classe politique et du tissu associatif ont permis d’éveiller les consciences et de préparer le terrain à cette décision. Déjà, il y a quelques mois, notre travail intense, relayé par une pétition, avait permis d’aboutir au dépôt d’une proposition de loi à l’Assemblée nationale. Aujourd’hui, c’est le Sénat qui s’engage dans la voie de la sagesse.
L’équipe de Stop au Porno se félicite tout d’abord de ce que les « contenus pour adultes » soient enfin interdits aux enfants. Un premier pas extrêmement positif, même s’il est certain que cette loi aurait dû être votée il y a des années déjà : en l’espèce, mieux vaut tard que jamais. Il nous paraît cependant essentiel d’exprimer des réserves, et de ne pas se laisser emporter par un enthousiasme qui serait infondé. Tout comme la plupart des personnalités engagées pour le contrôle de l’âge à travers le monde, nous savons que l’étape la plus importante commence après le vote de la loi. Alors que le Royaume-Uni a voté une loi similaire en 2017, les solutions techniques et les discussions sans fin ont empêché, à ce jour, d’avoir un contrôle effectif de l’accès aux sites pornographiques.
C’est pour cette raison que nous renouvelons nos appels à une prise en main urgente du sujet par l’opinion publique, par les médias et par les politiques. Le combat ne fait en effet que commencer.
Pierre-Marie Sève
Délégué général de Stop au porno
Constance Prazel
Vice-présidente de Stop au porno