Source [France Bleu] : La Ciivise, la Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants, formule ce vendredi 82 préconisations dans son rapport final, près de trois ans après sa création. Parmi ces recommandations, une proposition phare : rendre les violences sexuelles sur les mineurs imprescriptibles.
Depuis 2018, la loi permet aux personnes victimes de violences sexuelles pendant l’enfance de déposer plainte jusqu’à l’âge de 48 ans. Au-delà, les faits sont considérés comme prescrits et aucune poursuite judiciaire n’est possible. Aujourd’hui, l’imprescriptibilité est possible uniquement pour les crimes contre l’humanité.
Un tiers des personnes entendues sont pour l’imprescriptibilité
Pour la Ciivise, lever la prescription pour les violences sexuelles sur mineurs serait l’un des moyens « les plus justes de remettre la justice à sa place« . La Ciivise souligne qu’un tiers des 30.000 personnes entendues par la Commission ont demandé à ce que la prescription soit levée en cas de viol ou d’inceste sur des enfants.
Repérage des enfants, extension de l’inceste aux cousins, sécurité du parent protecteur…
Outre cette imprescriptibilité, la Commission met en avant neuf autres « préconisations-clef », notamment le repérage par le questionnement systématique des enfants, la création de rendez-vous individuels annuels de dépistage et de prévention centré sur l’évaluation du bien-être de l’enfant, ou encore le renforcement du contrôle des antécédents des pédocriminels grâce au FIJAISV, le fichier judiciaire automatisé des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes. La Commission préconise aussi d’étendre la notion d’inceste au cousin ou à la cousine, de garantir la sécurité du parent protecteur en cas d’inceste parental, la suspension de plein droit de l’exercice de l’autorité parentale et des droits de visite et d’hébergement du parent poursuivi pour viol ou agression sexuelle incestueuse contre son enfant, et le retrait systématique de l’autorité parentale en cas de condamnation. La Ciivise demande aussi à ce que les soins spécifiques dont les victimes ont besoin pour soigner leurs traumatismes soient intégralement remboursés par la Sécurité sociale, ou encore d’empêcher par la loi l’agresseur de reconnaître l’enfant issu du viol.
Un enfant victime toutes les trois minutes
En France, selon la Ciivise, plus de cinq millions de personnes adultes ont été confrontées à des violences sexuelles avant l’âge de 18 ans. 160.000 enfants en sont victimes chaque année, soit un enfant toutes les trois minutes. Huit fois sur dix les violences sont commises par un membre de la famille. Dans 97% des cas, l’agresseur est un homme.
Ce rapport de la Ciivise est officiellement le dernier puisqu’après presque trois ans d’activité, sa mission prend fin à la fin de l’année. Les auteurs du rapport s’inquiètent d’ailleurs de la suppression de cette commission avec le risque, disent-ils, que la mobilisation sur ce sujet faiblisse. Elisabeth Borne doit se prononcer la semaine prochaine sur son éventuel maintien.